Amédée LANGLADE
ouvrier poète français
18..-18..
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Le nuage et l'exilé
Rêverie
Emporté par les zéphyrs,
Où vas-tu, léger nuage ?...
Vas-tu vers le doux rivage
Où s'envolent mes soupirs ?
Sous l'azur étoilé des cieux,
J'observe ta fuite rapide,
Et mon front devient soucieux
Et je sens ma paupière humide.
Emporté par les zéphyrs,
Où vas-tu, léger nuage ?...
Vas-tu vers le doux rivage
Où s'envolent mes soupirs ?
Vas-tu vers la vallée en fleurs
Où s'étend mon humble village,
Pour fertiliser de tes pleurs
Les prés, les champs et le feuillage ?
Emporté par les zéphyrs,
Où vas-tu, léger nuage ?...
Vas-tu vers le doux rivage
Où s'envolent mes soupirs ?
Là-bas, fidèle à ses serments,
Doit souffrir celle que j'adore.
Peux-tu, toi qui vois mes tourments,
La prier de m'attendre encore ?
Emporté par les zéphyrs,
Où vas-tu, léger nuage ?...
Vas-tu vers le doux rivage
Où s'envolent mes soupirs ?
Vas-tu plaindre le désespoir
Et l'amour d'une pauvre mère
Qui, pour moi, redit chaque soir
Son chapelet et sa prière ?
Emporté par les zéphyrs,
Où vas-tu, léger nuage ?...
Vas-tu vers le doux rivage
Où s'envolent mes soupirs ?
J'y songe... Ah ! d'un autre exilé,
Tu vas porter l'adieu, peut-être,
Qu'en son dernier souffle exhalé,
Il fit aux lieux qui l'ont vu naître.
Emporté par les zéphyrs,
Où vas-tu, léger nuage ?...
Vas-tu vers le doux rivage
Où s'envolent mes soupirs ?
Pour suivre l'élan de mon cœur,
Que ne puis-je, ô nue irisée !
Comme toi m'enfuir en vapeur
Et fondre en gouttes de rosée.
Emporté par les zéphyrs,
Où vas-tu, léger nuage ?...
Vas-tu vers le doux rivage
Où s'envolent mes soupirs ?
Hélas ! bien loin, sous l'horizon,
Tu disparais et moi je prie...
Adieu, va mouiller le gazon
Du sol chéri de ma patrie.
Emporté par les zéphyrs,
Où vas-tu, léger nuage ?...
Vas-tu vers le doux rivage
Où s'envolent mes soupirs ?
in Fleurs incultes, poésies d'un ouvrier - 1880